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Chapitre 1

 

Les tribulations salariales 

 

 

 

Il avait son caractère, mon père, ça dropait au boulot. L’ambiance y était  malgré tout conviviale car, vite cernés, les employés savaient que c’était un bon, un peu « grinchon » mais un bon.

Faut dire qu’il en a vu des vertes et des pas mûres. De Jean-Paul qui faisait la bringue chaque week-end et qui avait un peu de mal à travailler le dimanche… lui, il aura fait tomber une plaque complète de gâteaux dans le bac à plonge. Soit dit en passant, Jean-Paul deviendra plus tard mon oncle car ayant flashé sur la sœur de ma mère, ils finiront par se marier et ouvrir une pâtisserie… ça c’est de l’entreprise familiale.

Il y a eu aussi, Francis, fils de boulanger d’une commune voisine qui lui, toujours un problème de dimanche, arrivait régulièrement en retard et devait se prosterner une dizaine de minutes à genoux devant le four, au chaud, pour éviter d’avoir des remontées alcooliques… bref, on avait droit à la prière du dimanche sans aller à la messe. Francis, après quelques années de maturité supplémentaires bien attendues finit par reprendre l’entreprise de ses parents. Bon, il y eut quelques aléas de justice… afin de gagner un peu d’argent facile, Francis, ajoutait des petits sacs de poudre blanche dissimulés dans ses réserves de farine… mais il pensait pas faire mal ! Poudre blanche pour poudre blanche, il a voulu faire évoluer le métier de boulanger. Mais un jour, un sac de poudre blanche, pas issue du blé, a dû crever et s’est mélangée à sa recette de pain… bref, faute de faire pousser la poudre blanche, la vraie, pour en faire du bon pain, il a dû se résoudre à manger du pain sec, même pas le sien, et de l’eau pendant quelque temps. Il reprit le chemin du bon pain un peu plus tard.

Il y eut aussi Jean-Pierre qui prenait un peu de temps aussitôt qu’il le pouvait pour s’assoir, tel un bouddha, sur le plan de travail. Je me souviens que mon père n’en revenait pas car il était le premier à oser faire une pause petit déjeuner comme ça. Ben oui, ils étaient tous des travailleurs du « tôt le matin » et mon père avait donc instauré une pause petit déjeuner. De part son origine polonaise, mon père leur offrait un panel de charcuteries polonaises, metka, leberka. Je me souviens de la tête des petits jeunes qui n’avaient jamais faim car quand on était nouveau avec « grinchon », qui leur disait à sa manière : « FAUT MANGER !!! »faut-manger.jpg on avait un peu l’estomac noué… Une petite touche à la française était pourtant offerte, comme du fromage ou de la viennoiserie qu’ils fabriquaient du matin… bref, chacun mangeait ce qu’il voulait. A noter que malgré l’origine française de la plupart des ouvriers, sauf les p’tits jeunes, ils se faisaient facilement nationaliser polonais pour cette pause hebdomadaire bien attendue. Donc après cette pause, reprise du boulot jusqu'à treize ou quatorze heures… pause du non moins étonnant Jean-Pierre vers quatorze heures deux… ou trois. Là, « le » Jean Pierre attendait mon père qui devait le reconduire chez lui, faute d’avoir une voiture. J’allais parfois avec lui et je me souviens qu’il buvait un verre. Je savais que c’était par amitié de la part de Jean-Pierre mais pendant cette collation, je voyais mon père se transformer en une « mère Théresa » pour remonter le moral et stopper les pleurs des petits, très petits malheurs de J.-P. Moi, du haut de mes sept ou huit ans, j’avais un peu de mal à comprendre comment un gaillard comme lui, qui osait braver les interdits de la pause « p’tit dej » pouvait se mettre à pleurnicher comme ça.

Un peu plus tard vint Serge, bosseur dans l’âme, de taille moyenne, jambes légèrement arquées… un peu bourru toujours avec sa roulée de tabac gris au bec. Je me souviens qu’il tranchait les pommes au petit couteau plus vite qu’on le fait aujourd’hui avec un appareil. Un jour, Francis « la poudre blanche » qui avait tendance à ne pas respecter les aînés lui mit du sel en guise de sucre dans son café… et lui dit : « tiens Serge, j’tai versé ton café ». Réaction !... vexé de cette mauvaise plaisanterie après une première gorgée, il but le reste « cul sec » en invoquant un « pauv’con » et repartit travailler sans broncher. Un autre dénommé Sarkozy, reprit l’expression bien plus tard en « casse-toi pauv’con » durant l’année 2011… Serge finit par rendre son tablier, question d’âge, mais en ayant pris le soin de faire entrer son fils dans l’entreprise, un dénommé Arnaud...

à suivre...

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  • : Le blog du livre LES AVENTURIERS DE L'ARTISANAT
  • : ...parce qu’un jour, il faut en parler ! Découvrez, sans pudeur et vu de l’intérieur, la vie d’une petite entreprise Artisanale. Les abus taxatifs et les conséquences de la crise financière. Vivez par la lecture de ce livre, les difficultés des petites et moyennes entreprises à survivre dans notre beau pays « Roi des Taxes ». Plusieurs témoignages dans ce livre.
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ILV EDITION -  ISBN : 978-2-35209-577-4 
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